Commandos Wallons en décembre 1944
La resistance pendant la Bataille des Ardennes
A l'honeur de Albert Thill, Emile Wollvert, Alexis Gvosdarieff and Wil Kapoustin
Au cours de notre recheche sur la période de guerre d'Albert Thill, commandant de la région X de l'Armée secrète, nous avons passé près de trois ans à rassembler autant de preuves et de documents que possible sur ses actions pendant la guerre et son influence dans les années qui ont suivi.
Une recherche approfondie, nous emmenant dans les archives du Cegesoma de Bruxelles jusqu'aux frontières luxembourgeoises dans son village natal d'Ennal (Grand-Halleux), couvrant les derniers vestiges de témoignages en cherchant une véritable clôture sur plusieurs faits historiques. Albert Thill a écrit ses mémoires de guerre dans un livre qu'il a publié en 1983.
« L'insaisississable patriote des Ardennes » est une autobiographie sur ce qu'il a vécu
les premiers jours de la guerre en 1940 et comment il fonde le mouvement de résistance «Commandos Wallons» avec son cousin Emile Wollvert sur les « Roches d'Ennal » en juin 1941.
Il devient le maître des fausses identités et le commandant « A.13 » du Groupe Thill - Commandos Wallons. En collaboration avec le Groupe G et le Service Hotton, les Commandos Wallons, occupant les maquis des bois d'Ennal, Baclain et Langlire, exécuteront des sabotages à Gouvy et Trois-Ponts au cours des années 1943 et 1944.
L'exécution de collaborateurs allemands figurait également sur leur liste....
Albert Thill et son cousin Emile Wollvert sur les Roches d'Ennal
Une partie de son livre est consacrée à sa participation avec plusieurs autres maquisards aux événements situés en décembre 1944. Hitler lança sa dernière offensive le 16 décembre 1944 - entrant à nouveau en Belgique, créant une bataille entre les forces alliées et ses troupes SS renforcées par de jeunes et les hommes plus âgés, connus sous le nom de "Volkssturm". Albert prétend que plusieurs de ses anciens amis de combat ont pris contact avec lui pour occuper à nouveau le maquis, comme George Lemaire et Jean Gustin de Grand-Halleux. Mais ils ne l'ont pas fait... Au lieu de cela, Albert prit contact avec un «Capitaine Sanders» à leur point de rendez-vous appelé «le Croix d'Ennal» le 18 décembre 1944, juste à la sortie d'Ennal sur la route de Grand-Halleux. Ce 82nd Airborne Captain Sanders jouera un rôle majeur dans cette partie de l'histoire que nous avons reconstituée sur les événements des 23 et 24 décembre 1944. Une collaboration entre la résistance et les forces américaines, juste à une époque où les choses empiraient dans une catastrophe...
Le lieu actuel dit " Le Croix d'Ennal
La lettre de Albert Thill en 1947
________________________________________________________________________
La récupération de cette lettre, dactylographée le 10 mars 1947 par Albert Thill, a été le début de toute la recherche. Plusieurs corrections sont apportées et la lettre n'est pas signée, ce qui indique qu'elle n'a pas du tout été postée. S'agissant d'un brouillon de lettre, nous n'avons aucune certitude que la lettre officielle a été envoyé par courrier à son destinataire à Bruxelles... Albert répond à plusieurs questions posées par le Commandant National de l'Armée Sécrète à Bruxelles, après une lettre qu'il a reçue le 26 février 1947. Une enquête sur toute forme de collaboration avec les forces alliées/américaines lors de la Bataille des Ardennes. Albert a répondu à cette question en déclarant que des copies de ses journaux avaient été envoyées au Bureau de la Résistance, 1ère Section. En complément de ses écrits, il indique aussi la liste qu'il a reçue de la Commission de contrôle de la Résistance à Stavelot. Selon lui, cette liste n'était pas complète en disant : «N'oubliez pas les résistants isolés, sans matriculation dans les rangs de l'Armée Secrète ! "
Albert indique les réfugiés russes des charbonnages de «La Campine», arrivés dans sa région et le maquis de Baclain. Ils étaient disciplinés et ils ont fait preuve d'endurance. Aussi lorsque l'offensive allemande se développa, plusieurs d'entre eux proposèrent à nouveau du service pour aider les Alliés sous le commandement de Pol Remacle et de lui-même. Et là, les choses deviennent très intéressantes !! Il envoyait avec cette lettre une copie d'une liste des seize Russes arrivés à Baclain le 7 avril 1944. Mais il confirme aussi la mort de deux de ces hommes, soit Alexis Gvosdarieff et Wil Kapoustin, rapportée par Jean Gustin. Ces hommes moururent lors de l'exécution de leur mission à Manhay, en passant Erezée le 24 décembre 1944. Jean Gustin lui-même fut blessé et il survécut en se cachant sous le châssis d'une jeep à «Belle-Haie».
À la deuxième page, il entre plus dans les détails de la mission que ces hommes exécutaient.
Au moment du création de sa lettre, il ne sait toujours pas ce qui est arrivé aux corps des deux hommes. Leur mission est imposée par le capitaine Sanders, un officier américain du quartier général de la 82e division aéroportée à Grand-Halleux. Ils ont été obligés en tant que «garde de route» de guider les évacuations massives de civils. Ce 23 décembre 1944, un lieutenant de la 203e batterie « D » suggère de suivre les semi-chenilles en direction de La Baraque. Jean décide cependant de faire un détour en passant par Fraiture et Malempré.
Les faits détaillés par Albert Thill sont extraordinaires.
Un officier américain offre une jeep aux trois maquisards à devenir guides dans une évacuation dans une région qui se trouve sur le point d'être inondée à nouveau par les britalités des forces SS allemandes.
Dans son livre, Albert Thill parle de son contact avec ce capitaine Sanders. Lui-même, prend la route de Werbomont le même jour.
Analyser la lettre de Albert Thill
________________________________________________________________________
Dans son livre « L'Insaisissable Patriote des Ardennes », Albert Thill dresse très détaillée les 16 réfugiés.
Ils sont arrivés le 7 avril 1944 et Le commandant du groupe était Alexis Gvosdarieff.
Albert a fourni une photo pour l'édition « Patriote Illustré » du 5 mai 1946 avec l'ensemble des 16 hommes, prise au moment de la libération de septembre 1944.
A : Alexis Gvosdarieff, né à Riga en 1912. Sa dernière adresse connue était :
rue Malayapouchkarskaya, numéro 28, appartement 26 à Leningrad.
B : Wil Kapoustin, né à Leningrad le 14 mars 1924. Sa dernière adresse connue était :
rue Tcheykovsky, numéro 20, chambre 42 à Leningrad.
Dans son livre « Agent de la Résistance », Herman Bodson donne une bonne description de la valeur et des capacités de ces réfugiés russes.
Herman était au maquis de Baclain, jusqu'au moment où les choses se gâtèrent lorsque le camp fut compromis en juin 1944.
Constant Pivaroff, soldat de la section d'artillerie russe, était un véritable expert en explosifs, c'est aussi lui qui préparait les charges pour les sabotages de la gare de Gouvy et de Trois-Ponts.
Ces hommes étaient des soldats. Herman en a choisi deux à devenir ces gardes, car il disait : « ils savent très bien ce qu'ils font ! ».
Alexis Gvosdarieff était officier au département criminel de l'armée russe, avant de devenir prisonnier de guerre et enrôlé dans les travaux forcés dans les mines de charbon de « La Campine ».
Après la libération, la plupart d'entre eux restèrent dans la région, jusqu'en 1946. Plusieurs restèrent dans les environs de Vielsalm et de Stavelot. Mais Alexis et Wil n'ont pas survécu à la Bataille des Ardennes. Les habitants de Baclain ont rassemblé suffisamment d'argent en 1946 pour offrir aux autres un voyage en bus jusqu'à Léningrad et ils sont retournés en Russie. Pourtant, on prétend qu'ils furent arrêtés à leur arrivée et condamnés à mort sous le régime stalinien, reconnus coupables de trahison en travaillant pour les Allemands...
_________________________________________________________________________
Une mission innitié par un certain capitaine Sanders de la poste de commande de Grand-Halleux, daté le 23 décembre 1944....
Une référence croisée au témoignage d'Albert Thill dans son livre et sa lettre et dans les
rapports après les actions des companies américaines du 505th PIR, ont permis de déterminer l'identité du capitaine Sanders.
Déjà le 21 décembre 1944, capitaine Sanders cherchait Albert Thill à Ennal. Le capitaine n'avait aucune idée du nombre de maquisards qui se trouvaient encore dans la région, car le 23 décembre 1944, il demanda 150 hommes pour l'aider à évacuer. La plupart des anciens résistants de la région se trouvent à nouveau cachés, seuls quelques-uns d'entre eux ont pris contact avec Albert à reprendre l'action contre les Allemands ( page 224, L'Insaissible patriote des Ardennes, Albert Thill ).
Le 23 décembre 1944, la compagnie G et I du 3dr bat du 505 Parachute Infantry Regiment sous le commande du lieutenant-colonel James L. Kaiser, défendait Grand-Halleux, Petit-Halleux, combiné avec le pont du Rivière Salm. L'église dans le centre était un poste médical. Plus haut sur la route en direction d'Ennal, une petite chapelle Saint-Ferdinand devint le siège du 3HHC.
Chapelle Saint Ferdinand at Grand-Halleux
John Henry Sanders in 1939
Selon le témoignage de 2003 du Capitaine Jack R. Isaacs (Commandant de Compagnie du G Comp, 3th Bat, 505 PIR, 82nd ), ils n'avaient pas un jeep à leur disposition au poste de commande de leur compagnie sur la route vers Petit-Halleux, à proximité du petit pont. Ce poste de commandement fut installé le 20 décembre 1944 jusqu'à ce qu'ils reçoivent l'ordre de retrait dans la nuit du 24 décembre 1944.
( Un compte rendu des activités de la compagnie « G » 505th Parachute Infantry, 82nd Airborne Division par le capitaine Jack R. Isaacs, 2003 )
Ce fait rend impossible que la jeep qui ait été délivrée aux 3 maquisards par la Compagnie G ou son QG au Grand-Halleux.
En fouillant les archives des militaires enrôlés du 505th PIR à la date du 8 mai 1945, on a constaté que le seul officier ayant le grade de capitaine au 3HHC (Headquarment Command) à la chapelle est renseigné à :
Sanders John Henry (0-384914, 3HHC)
D=19-08-68* 1968 - Cimetière d'Oakland, Navasota, Texas Capitaine des États-Unis - 1945
Albert Thill prenait déjà contact avec le premier poste de sécurité de ce quartier général le 18 décembre 1944 au carrefour de la Croix d'Ennal (à 2 kms du quartier général lui-même), où on négociait déjà un véhicule « auto blindé » !
(page 223, L'Insaissible patriote des Ardennes, Albert Thill )
La compagnie complète du QG du 3e Bataillon, 505e PIR, photo prise à Fort Bragg en 1943. Le capitaine Sanders est situé le plus droite des cinq officiers dans le centre.